la petite dernière

La petite dernière

Hafsia Herzi signe un film d’émancipation bouleversant et nécessaire.

Banlieue parisienne.
Nadia, 18 ans, vit entre la mosquée, le lycée et l’appartement familial. Dernière d’une fratrie nombreuse, elle porte le poids des traditions, des attentes, des prières et du regard des autres. Mais à l’aube du bac, elle découvre en elle un sentiment nouveau — l’attirance pour une autre fille.
Entre religion, loyauté et désir d’émancipation, La petite dernière raconte le combat d’une jeune femme pour s’appartenir.

Un film d’émancipation

Hafsia Herzi filme la jeunesse avec une pudeur rare.
La caméra colle au visage, capte les silences, les gestes retenus, les respirations coupées.
Le film n’est pas une provocation, mais une confession — une traversée du doute et de la honte vers la lumière. “Se trouver, c’est parfois désobéir à ceux qu’on aime.” Tout le scénario repose sur cette fracture :
comment grandir quand chaque pas en avant blesse ceux qu’on laisse derrière soi ?

Herzi signe une œuvre initiatique : une chronique du passage à l’âge adulte, ancrée dans un contexte social, religieux et culturel rarement représenté avec autant de justesse.

Thèmes : l’arrachement et la réconciliation

Le film reprend la thématique de “L’arrachement” chère à la littérature contemporaine (on pense à La Faille de Blandine Rinkel). Ici, l’arrachement n’est pas une fuite. C’est une perte nécessaire : celle d’une version de soi qu’on ne peut plus habiter.

Interprétation : Nadia Melliti, révélation absolue

Nadia Melliti crève l’écran. Dans son corps fermé, ses yeux fuyants, tout respire la tension intérieure.
Elle joue une héroïne en survêtement, garçon manqué dans un monde où tout est codé : la pudeur, les gestes, les mots. Mais quand elle s’éveille — dans les soirées étudiantes, dans les regards — elle devient incandescente. Sa performance, entre rage et douceur, rappelle l’énergie brute de Hafsia Herzi dans La Graine et le Mulet. La scène face à la mère (interprétée avec une humanité bouleversante) — “Les mamans veillent toujours sur leurs enfants même quand elles sont mortes” — est l’un des moments les plus forts du cinéma français de l’année.

Mise en scène et esthétique

Hafsia Herzi choisit une réalisation intimiste, proche du documentaire. Caméra épaule, lumière naturelle, visages en gros plan. Musique minimaliste, parfois absente, laissant la respiration du réel. Plans géométriques sur les mosaïques et les murs de la cité — un décor identitaire, à la fois enracinement et enfermement. Le contraste entre les cités de Seine-Saint-Denis et les appartements bourgeois parisiens souligne la fracture sociale et culturelle, mais aussi le courage de franchir les mondes.

Analyse : foi, corps et liberté

La petite dernière n’oppose pas croyance et liberté. Elle montre le combat intérieur d’une jeune femme qui veut être fidèle à ses valeurs et à son cœur. La religion n’est pas ici un ennemi, mais un miroir : “La foi ne condamne pas. C’est le regard des hommes qui enferme.” Le film ne cherche pas la polémique. Il cherche la vérité. Celle du corps, du désir, du droit d’exister en dehors du modèle.

Lecture sociale et générationnelle

La petite dernière raconte ce que vivent des milliers de jeunes en France : ce moment où l’on passe du “nous” au “je”. Le film n’est pas seulement un récit de coming-out, mais un manifeste doux sur la dignité et la complexité des identités multiples.

Ni victime, ni héroïne : juste une fille qui veut vivre.

Prix et réception

  • Prix d’interprétation féminine – Festival de Cannes 2025
  • Ovation du public de la Quinzaine

Un choc de sincérité

LE MONDE

Un film de vérité, lumineux et courageux

TELERAMA

Note : 9,1 / 10

Chef-d’œuvre d’émancipation

La petite dernière est un film intime, brûlant, universel.
Herzi y filme le courage d’exister, la peur de blesser, et la beauté d’aimer malgré tout.

Il faut parfois perdre le monde pour enfin se trouver soi-même.

La note de Ciné Revue

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